Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 6, 1839.djvu/385

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ceux qui y cherchaient Élisabeth, et qui faisaient retentir les échos de son nom.

Au premier intervalle que laissa la pluie, Edwards conduisit Élisabeth sur la route, où il la laissa. Mais avant de se séparer d’elle il lui dit avec un ton qu’elle ne sut comment interpréter :

— Le temps du mystère est passé, miss Temple. Demain à pareille heure, j’aurai déchiré le voile dont j’ai peut-être eu tort de me couvrir si longtemps. Mais j’avais des idées romanesques, une faiblesse à laquelle j’ai eu la folie de céder. Et comment s’en garantir quand on est jeune et déchiré par les passions ? J’entends la voix de votre père ; il vous cherche, et il faut que je vous quitte, car je ne puis en ce moment m’exposer à une détention. Adieu ! Grâce au ciel, vous êtes en sûreté, et mon cœur se trouve déchargé d’un poids énorme.

Il s’enfonça dans les bois, sans attendre sa réponse, et quoique Élisabeth entendit les cris perçants de son père, qui répétait son nom avec l’accent du désespoir, elle ne lui répondit que lorsqu’elle eut vu Edwards disparaître au milieu des arbres encore fumants. Quelques instants après, Marmaduke eut le plaisir de serrer sa fille dans ses bras.

On s’était pourvu d’une voiture pour ramener miss Temple, si on la retrouvait morte ou vivante ; le père et la fille y montèrent précipitamment, et s’entretinrent, chemin faisant, des dangers auxquels elle venait d’échapper. Le bruit qu’elle était retrouvée se répandit de bouche en bouche sur toute la montagne, parmi les villageois qui la cherchaient, et ils retournèrent chez eux, mouillés jusqu’aux os, noircis de charbon, couverts de boue et de cendres, mais joyeux de savoir que la fille du fondateur de leur colonie avait été arrachée à une mort horrible et prématurée.