Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 7, 1839.djvu/199

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en désordre, car il ne songea pas à s’approprier la moindre chose de tout ce qui lui passait par les mains ; il ne semblait même faire aucune attention à la valeur des objets qui souffraient de ses manières si peu cérémonieuses.

Lorsqu’il eut examiné ainsi l’intérieur de toutes les cabanes, et qu’il eut été faire une nouvelle visite dans l’endroit où il avait enfermé les enfants, qu’il avait eu soin de lier avec des cordes ; lorsqu’il eut, uniquement par espièglerie, fait sauter du haut du rocher, d’un grand coup de pied, un des seaux d’Esther, comme si c’eût été une balle, il se rapprocha du bord du plateau, et passant ses deux mains dans sa ceinture, il se mit siffler l’air des chasseurs du Kentucky, avec autant d’ardeur que s’il eût été payé à l’heure pour faire de la musique à ses auditeurs. Il était encore occupé de cette manière quand Middleton, comme nous l’avons dit, sortit de la tente avec Inez, et donna une nouvelle direction aux idées de tous ses compagnons. Il fit oublier à Paul sa musique, arracha le docteur à la contemplation de sa plante, et, comme chef reconnu de la petite troupe, donna les ordres nécessaires pour qu’on se disposât à partir sur-le-champ.

Le moment d’empressement et de confusion qui suivit naturellement un pareil ordre, ne laissa à personne le temps de se livrer aux plaintes ni aux réflexions ; chacun s’occupa des préparatifs qui convenaient à ses forces et à sa situation. Le Trappeur s’était déjà emparé de l’âne, qui tondait l’herbe tranquillement à peu de distance du rocher, et il s’occupait alors à lui placer sur le dos la machine compliquée que le docteur Battius jugeait à propos d’appeler une selle de son invention. Le naturaliste saisit ses portefeuilles, son herbier et sa collection d’insectes, qu’il plaça avec soin dans deux sacs suspendus à la susdite selle, mais que le Trappeur jeta avec dédain, du moment qu’il eut le dose tourné. Paul porta au bas du rocher les légers paquets qu’Inez et Hélène avaient préparés d’avance pour leur fuite, tandis que Middleton, après avoir employé les menaces et les promesses pour engager les enfants à rester tranquillement dans la situation où on les laissait, aida les deux femmes à descendre du rocher. Comme le danger devenait urgent, puisqu’il était probable qu’Ismaël ne tarderait pas à revenir, on mit la plus grande célérité à faire tous ces préparatifs.

Le vieux Trappeur plaça quelques provisions, qu’il regardait comme nécessaires à la portion la plus faible et la plus délicate