Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/102

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attention et intérêt. Il parut sympathiser à son chagrin ; mais le bonheur de ces tribus païennes, qui pouvaient être amenées à la lumière de la foi par l’entremise du jeune Indien, était trop important pour perdre légèrement les avantages qu’il avait gagnés sur l’intelligence de son prisonnier, en lui procurant les moyens de s’échapper. Suivant toute apparence, l’intention de permettre au prisonnier de quitter les palissades était entièrement abandonnée, lorsque le vieux capitaine annonça subitement son changement de résolution. Les conjectures que chacun forma sur les causes de cette détermination inattendue varièrent à l’infini ; quelques-uns pensèrent que le Puritain avait été favorisé d’une mystérieuse révélation des desseins de la Providence ; d’autres, au contraire, que, commençant à désespérer du succès de sa pieuse entreprise, il voulait essayer si la Providence manifesterait plus clairement ses projets s’il abandonnait le jeune Indien à ses propres impulsions. Chacun sembla croire que si le captif revenait à la vallée, cette circonstance pourrait être considérée comme un miracle. Cependant lorsque le vieux capitaine eut pris cette résolution, elle demeura inébranlable. Il annonça son intention après une de ces longues et solitaires visites dans la forteresse, où probablement il avait soutenu un grand combat spirituel à cette occasion. Comme le temps était favorable à son projet, Mark Heathcote ordonna à ses serviteurs de se préparer à faire une sortie le matin suivant.

L’expression d’une joie soudaine se montra sur les traits du jeune Indien lorsque Ruth remit entre les mains du captif l’arc de son propre fils, et que par ses signes et ses paroles elle lui fit comprendre qu’il pourrait s’en servir avec liberté dans la forêt. Mais cette expression de plaisir disparut aussi promptement qu’elle était venue. Lorsque le jeune Indien reçut les armes, ce fut plutôt avec l’air d’un chasseur accoutumé à leur usage qu’avec celui d’un prisonnier aux mains duquel elles étaient depuis si longtemps étrangères. Au moment où il quitta les portes de Wish-ton-Wish, les servantes de Ruth se précipitèrent autour de lui avec un curieux intérêt, car il semblait étrange de voir un jeune sauvage, jusqu’alors surveillé avec une aussi grande vigilance, jouir d’une entière liberté. Malgré la confiance ordinaire dans les lumières et la grande sagesse du Puritain, on croyait généralement que l’enfant dont l’arrivée avait été enveloppée de mystère, et dont la présence était d’une si grande importance à