Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/146

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L’étranger étudia en vain l’expression de ses traits ; et, s’approchant assez près pour poser sa main sur l’épaule nue du jeune garçon, il ajouta :

— Jeune homme, tu as entendu des choses bien touchantes sur notre religion chrétienne ; tu as été l’objet de bien des prières ferventes ; de si bonnes semences n’auront pas toutes été emportées par le vent. Parle, peut-on de nouveau se fier à toi ?

— Que mon père regarde sur la neige, les traces du mocassin vont et viennent.

— C’est vrai, jusqu’ici tu t’es montré honnête ; mais lorsque le cri de guerre vibrera dans ton jeune cœur, la tentation de rejoindre les guerriers pourra être trop forte. As-tu quelque gage dans lequel nous puissions trouver une garantie pour ton départ ?

Le jeune Indien regardait le questionneur de manière à prouver clairement qu’il ignorait ce qu’il voulait dire.

— Je voudrais bien savoir ce que tu peux me laisser, pour nous prouver que nos yeux reverront encore ton visage, lorsque nous aurons ouvert la porte pour que tu ailles dans les champs ?

Les regards de l’Indien montraient toujours la même surprise et la même ignorance.

— Lorsque l’homme blanc est sur le sentier de la guerre et qu’il permet à un ennemi de retourner près des siens, à la condition de revenir, il prend un gage de sa foi, en retenant quelqu’un qui lui est cher, comme une garantie de sa parole. Que peux-tu m’offrir, pour m’assurer que tu reviendras ?

— Le sentier est libre.

— Libre, oui ; mais il n’est pas certain que tu y reviendras ; la crainte peut te faire oublier le chemin qui y conduit.

Le captif commença alors à comprendre les doutes de l’étranger ; mais, comme s’il dédaignait de répondre, il détourna les yeux et prit une de ces attitudes impassibles qui le faisaient si souvent ressembler à une statue d’une couleur sombre.

Content et sa femme avaient écouté ce dialogue de manière à prouver que quelque connaissance secrète diminuait la surprise qu’ils auraient dû ressentir lorsqu’ils s’aperçurent qu’il existait quelque liaison mystérieuse entre l’Indien et l’étranger ; mais les deux colons manifestèrent des signes non équivoques d’étonnement lorsqu’ils entendirent le jeune sauvage prononcer des mots anglais. Il y avait au moins de l’espoir dans la médiation de celle