Page:Coppée - Œuvres complètes, Prose, t3, 1890.djvu/314

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

prétexte de circuler dans l’appartement, de traverser la pièce où se tenait Henriette assise et cousant, de l’envelopper d’un rapide regard, de recevoir l’éclair fugitif de ses yeux. Puis il rentrait dans sa chambre d’étudiant, se jetait avec fatigue sur son canapé et restait là, accablé, le front chaud, les mains inquiètes, avec des bâillements et des envies de pleurer.

Mieux informée sur la vie, Henriette finit par s’apercevoir du trouble du jeune homme en sa présence. Était-ce possible ? Elle lui plaisait ! Ce « petit monsieur », si délicat, si « mignon », comme elle se le disait en pensée dans son langage populaire, cet Armand qui lui semblait être d’une autre race qu’elle-même, qui lui faisait l’effet d’une sorte de demi-dieu, daignait prendre garde à elle ! Dans son humilité sincère, elle en fut d’abord toute confuse. Puis une tendresse infinie inonda son cœur.

Ah ! Armand n’avait qu’à faire un signe. Tout ce qu’il voudrait, tout de suite ! Très simple, purement instinctive, elle ignorait la coquetterie, les manèges d’amour. Oui ! sur un clin d’oeil, elle était prête à s’offrir, elle et sa jeunesse fleurie, prête à donner son cœur surtout, au fond duquel