Page:Corbière - Le Négrier.djvu/847

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tiers braver un péril certain, par désœuvrement, par ennui des choses ordinaires. J’ai vu quelquefois des marins maudire leur existence, et se jeter à la mort avec une espèce de joie sardonique. Mais il n’y avait rien de forcené dans le mépris que je faisais de la vie. C’était du dégoût et de l’indifférence : ma manière de végéter ainsi n’était enfin qu’un long et froid suicide.

Pitre, ce renégat, que je m’étais attaché comme un de ces mauvais génies qui se soumettent à une puissance plus forte que la leur, paraissait comprendre mon caractère et deviner mes intentions. Il lui fallait aussi, à lui, une fin. Quand je le voyais, avec mon flegme ordinaire, se plonger dans les excès qui, au milieu