Page:Corday - La Vie amoureuse de Diderot.djvu/70

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des résistances. Elle souleva des tempêtes qui furent bien lentes à s’apaiser. Car leurs dernières houles déferlent encore dans les lettres qui nous ont été conservées. On peut juger par là de ces orages eux-mêmes.

Mme Legendre, qui vivait alors près de Sophie, se montra d’abord hostile à Diderot. Ils se sentaient rivaux. Mme Legendre, singulièrement attachée à Sophie, appréhendait l’ascendant que cet homme allait prendre sur elle. Lui-même était jaloux des instants, des pensées, des caresses que son amie donnait à Mme Legendre, des éloges exaltés dont elle la couvrait. Il gémissait : « Ah ! la chère sœur est à côté de vous ; vous m’oubliez, vous me négligez. » Ou bien, comme il restait loyal et bon jusque dans l’égarement, il déplorait ses reproches excessifs : « Je suis devenu si ombrageux, si injuste, si jaloux, vous m’en dites tant de bien, vous souffrez si impatiemment qu’on lui remarque quelque défaut que… je n’ose achever… Adieu, je suis fou. »

Mme Legendre s’efforça donc de détourner sa sœur de la voie où elle s’engageait. Elle lui en montra les périls. Elle lui représenta surtout l’inconstance des hommes, qu’elle tenait en grand mé-