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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 1.djvu/443

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ACTE III, SCÈNE I.

Et je me sens forcée à lui vouloir du bien
D’avoir à votre État conservé ce soutien.

ALCANDRE.

Le généreux orgueil des âmes magnanimes
Par un noble dédain sait pardonner les crimes ;
735Mais votre aspect m’emporte à d’autres sentiments,
Dont je ne puis cacher les justes mouvements ;
Ce teint pâle à tous deux me rougit de colère[1],
Et vouloir m’adoucir, c’est vouloir me déplaire[2].

ROSIDOR.

Mais, Sire, que sait-on ? peut-être ce rival,
740Qui m’a fait après tout plus de bien que de mal[3],
Sitôt qu’il vous plaira d’écouter sa défense,
Saura de ce forfait purger son innocence.

ALCANDRE.

Et par où la purger ? Sa main d’un trait mortel
A signé son arrêt en signant ce cartel[4].
745Peut-il désavouer ce qu’assure un tel gage[5],
Envoyé de sa part, et rendu par son page ?
Peut-il désavouer que ses gens déguisés
De son commandement ne soient autorisés ?
Les deux, tous morts qu’ils sont, qu’on les traîne à la boue[6] ;
750L’autre, aussitôt que pris, se verra sur la roue[7] ;

  1. Var. Votre pâleur de teint me rougit de colère. (1632)
  2. Var. Et vouloir m’adoucir, ce n’est que me déplaire. (1632-57)
  3. Var. Qui m’a fait en tout cas plus de bien que de mal,
    Lorsqu’au votre conseil vous orrez sa défense. (1632-57)
  4. En marge, dans l’édition de 1632 : Il montre un cartel qu’il avoit reçu de Rosidor avant que d’entrer.
  5. Var. [Envoyé de sa part, et rendu par son page,]
    Peut-il désavouer ce funeste message ?
    [Peut-il désavouer que ses gens déguisés.] (1632-57)
  6. C’est ce qu’on appelait traîner sur la claie. Les cadavres de ceux qui avaient subi ce châtiment après leur mort étaient d’ordinaire jetés à la voirie.
  7. Var. L’autre, aussitôt que pris, se mettra sur la roue. (1632-57)