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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 1.djvu/550

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424
LA VEUVE.
LA NOURRICE.

475Ce cajoleur rusé, qui toujours vous assiége,
A tant fait qu’à la fin vous tombez dans son piège.

CLARICE.

Ce cavalier parfait, de qui je tiens le cœur,
A tant fait que du mien il s’est rendu vainqueur.

LA NOURRICE.

Il aime votre bien, et non votre personne.

CLARICE.

480Son vertueux amour l’un et l’autre lui donne :
Ce m’est trop d’heur encor, dans le peu que je vaux,
Qu’un peu de bien que j’ai supplée à mes défauts.

LA NOURRICE.

La mémoire d’Alcandre, et le rang qu’il vous laisse,
Voudroient un successeur de plus haute noblesse.

CLARICE.

485S’il précéda Philiste en vaines dignités[1],
Philiste le devance en rares qualités ;
Il est né gentilhomme, et sa vertu répare
Tout ce dont la fortune envers lui fut avare :
Nous avons, elle et moi, trop de quoi l’agrandir[2].

LA NOURRICE.

490Si vous pouviez, Madame, un peu vous refroidir
Pour le considérer avec indifférence.
Sans prendre pour mérite une fausse apparence,
La raison feroit voir à vos yeux insensés
Que Philiste n’est pas tout ce que vous pensez.
495Croyez-m’en plus que vous ; j’ai vieilli dans le monde[3],
J’ai de l’expérience, et c’est où je me fonde :

  1. Var. Il précéda Philiste en vaines dignités,
    Et Philiste le passe en rares qualités. (1634-57)
  2. Var. Elle et moi, nous avons trop de quoi l’agrandir.
    la nourr. Hélas ! si vous pouviez un peu vous refroidir. (1634-57)
  3. Var. Madame, croyez-moi ; j’ai vieilli dans le monde. (1634-57)