Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 10.djvu/268

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Associé d’Espagne, et non plus son rebelle. 50
Sur ce digne ennemi venge le ciel et toi :
Venge l’honneur du sceptre, et les droits de la foi.
Tant d’illustres fureurs, tant d’attentats célèbres
L’ont fait assez gémir chez lui dans les ténèbres :
Romps les fers qu’elle y traîne, et rends-lui le plein jour ; 55
Règne, et fais-y régner le vrai culte à son tour[1].
Ce grand prince m’écoute, et son ardeur guerrière
Le jette avidement dans cette âpre carrière,
La juge avantageuse à montrer ce qu’il est ;
Et plus la course est rude, et plus elle lui plaît. 60
Il s’oppose déjà des troupes formidables,
Des Ostendes, trois ans à tout autre imprenables[2],
Des fleuves teints de sang, des champs semés de corps,
Cent périls éclatants et mille affreuses morts ;
Car enfin d’un tel peuple, à lui rendre justice, 65
Après une si longue et si dure milice,
Après un siècle entier perdu pour le dompter[3],

    Hispano socius, nec tantum impune rebellis.
    Exorere o tandem spretis pro regibus ultor ;
    Rumpe moras, Lodoice. Vides ut puisa tot annos
    Relligio, trepidisque fides mala tuta latebris,
    Regalem implorant solvenda in vincula dextram.
    Nulla mora in Magno : placet hic, quia durior, hostis.
    Jamque sibi immensas acies, jamque horrida centum
    Prælia, difficilesque aditus, largaque rubentes
    Cæde virum fluvios, et inhospita littora fingit
    Scilicet, exsultatque fremens. Nam quid sibi quisquam,
    Et studia expendens, et opes, et robora gentis,

  1. Voyez la pièce précédente.
  2. En 1604, les Espagnols, commandés par Spinola, prirent Ostende après un siège de trois ans.
  3. La vive opposition des Pays-Bas au gouvernement espagnol, suivie bientôt de l’insurrection qui les affranchit, avait commencé