Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 10.djvu/276

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Ils ont fait aux Romains assez de résistance
Pour en espérer une en faveur de la France[1] ; 190
Et ces bords où jamais l’aigle ne fit la loi
S’oseront quelque temps défendre contre toi.
À ce nouveau projet le monarque s’enflamme,
Il l’examine, tâte, et résout en son âme ;
Et tout impatient d’en recueillir le fruit, 195
Il part dans le silence et l’ombre de la nuit.
Des guerriers qu’il choisit l’escadron intrépide
Glorieux d’un tel choix, et ravi d’un tel guide,
Marche incertain des lieux où l’on veut son emploi,
Mais assuré de vaincre où l’emploiera son roi. 200
Le jour à peine luit que le Rhin se rencontre :
Tholus frappe les yeux[2] ; le fort de Skeink se montre ;

    Degener Hollandus ; sed non sic flumina cedent,
    Romanis ut quondam, et nunc impervia Francis :
    Hic labor, hoc decus est. Stimulis ille acribus intus
    Accensus, tacitumque alto sub pectore versans
    Consilium, et placidæ subducens membra quieti,
    Lecta virum capita et primam rapit agmina secum
    Sub noctem, dux ipse operis, sociusque pericli.
    Incedunt densi ordinibus per opaca viarum,
    Incerti quo jussa trahant, sed vincere cerli,
    In quoscumque trahant casus. Et jam nova cœlo
    Cœperat ire dies, dubiaque albescere luce,
    Insula cura Batavum, et bifidis apparuit ingens
    Rhenus aquis, vacuasque acies insedit arenas
    Tholusium contra et Skinki meraorabile vallum.

  1. Le P. de la Rue et Granet ont mis : « ta France, » au lieu de : « la France, » qui est le texte de l’édition originale.
  2. « Des gens du pays informèrent… le prince de Condé, que la sécheresse de la saison avait formé un gué sur un bras du Rhin, auprès d’une vieille tourelle qui sert de bureau de péage, qu’on nomme Toll-huys, « la maison du péage, » dans laquelle il y avait dix-sept soldats. Le Roi fît sonder ce gué par le comte de Guiche. Il n’y avait