Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/215

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Est-ce votre dessein que je m’en prenne à vous ?
Est-ce votre dessein d’attirer mes blasphèmes,
Et qu’ainsi que mes maux mes crimes soient extrêmes,
Qu’à mille impiétés osant me dispenser,
À votre foudre oisif je donne où se lancer ?
Ah ! souffrez qu’en l’état de mon sort déplorable
Je demeure innocent, encor que misérable :
Destinez à vos feux d’autres objets que moi ;
Vous n’en sauriez manquer, quand on manque de foi.
Employez le tonnerre à punir les parjures,
Et prenez intérêt vous-même à mes injures :
Montrez, en me vengeant, que vous êtes des dieux,
Ou conduisez mon bras, puisque je n’ai point d’yeux,
Et qu’on sait dérober d’un rival qui me tue
Le nom à mon oreille, et l’objet à ma vue.
Rival, qui que tu sois, dont l’insolent amour
Idolâtre un soleil et n’ose voir le jour,
N’oppose plus ta crainte à l’ardeur qui te presse ;
Fais-toi, fais-toi connaître allant voir ta maîtresse.


Scène III

Florame, Amarante.


Florame.

Amarante (aussi bien te faut-il confesser
Que la seule Daphnis avait su me blesser),
Dis-moi qui me l’enlève ; apprends-moi quel mystère
Me cache le rival qui possède son père ;