Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/251

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Je perdrai mon amour avec mon espérance,
Et qu’y trouvant alors sujet d’aversion,
260Ma liberté naîtra de ma punition.

CLÉANDRE.

Après cette assurance, ami, je me déclare.
Amoureux dès longtemps d’une beauté si rare,
Toi seul de la servir me pouvois empêcher ;
Et je n’aimois Phylis que pour m’en approcher.
265Souffre donc maintenant que pour mon allégeance,
Je prenne, si je puis, le temps de sa vengeance ;
Que des ressentiments qu’elle aura contre toi
Je tire un avantage en lui portant ma foi,
Et que cette colère en son âme conçue[1]
270Puisse de mes desirs faciliter l’issue[2].

ALIDOR.

Si ce joug inhumain, ce passage trompeur,
Ce supplice éternel, ne te fait point de peur,
À moi ne tiendra pas que la beauté que j’aime
Ne me quitte bientôt pour un autre moi-même.
275Tu portes en bon lieu tes desirs amoureux ;
Mais songe que l’hymen fait bien des malheureux.

CLÉANDRE.

J’en veux bien faire essai ; mais d’ailleurs, quand j’y pense[3],
Peut-être seulement le nom d’époux t’offense,
Et tu voudrois[4] qu’un autre…

ALIDOR.

Et tu voudrois qu’un autre…Ami, que me dis-tu[5] ?

  1. Var. Et que dans la colère en son âme conçue. (1637-57)
  2. Var. Je puisse à mes amours faciliter l’issue. (1637)
    Var. Je puisse à mon amour faciliter l’issue. (1644-57)
  3. Var. Poussons à cela près ; mais aussi, quand j’y pense. (1637)
    Var. Faisons à cela près : mais aussi, quand j’y pense. (1644-57)
  4. L’édition de 1682 porte : « Et tu voulois, » ce qui est probablement une erreur. Toutes les autres impressions ont voudrois.
  5. Var. Et tu voudrois qu’un autre eût cette qualité