Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/255

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325Qu’on est peu dans leur cœur pour être dans leur bouche !
Et que malaisément on sait ce qui les touche !
Mais voici l’infidèle. Ah ! qu’il se contraint bien !



Scène II.

ALIDOR, ANGÉLIQUE.
ALIDOR.

Puis-je avoir un moment de ton cher entretien ?
Mais j’appelle un moment, de même qu’une année
330Passe entre deux amants pour moins qu’une journée.

ANGÉLIQUE.

Avec de tels discours oses-tu m’aborder[1],
Perfide, et sans rougir peux-tu me regarder ?
As-tu cru que le ciel consentît à ma perte,
Jusqu’à souffrir encor ta lâcheté couverte ?
335Apprends, perfide, apprends que je suis hors d’erreur ;
Tes yeux ne me sont plus que des objets d’horreur ;
Je ne suis plus charmée, et mon âme plus saine,
N’eut jamais tant d’amour qu’elle a pour toi de haine.

ALIDOR.

Voilà me recevoir avec des compliments[2]
340Qui seroient pour tout autre un peu moins que charmants.
Quel en est le sujet ?

ANGÉLIQUE.

Quel en est le sujet ?Le sujet ? lis, parjure ;
Et puis accuse-moi de te faire une injure !

  1. Var. Traître, ingrat, est-ce à toi de m’aborder ainsi,
    Et peux-tu bien me voir sans me crier merci ? (1637)
  2. Var. [Voilà me recevoir avec des compliments…]
    ANG. Bien au-dessous encor de mes ressentiments.
    ALID. La cause ? ANG. En demander la cause ! lis, parjure. (1637-57)