Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/264

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510J’y souffrirois plutôt cinquante amants qu’un frère[1] ;
Et puisque nos esprits ont si peu de rapport,
Je m’étonne comment nous nous aimons si fort.

LYSIS.

Vous êtes ma maîtresse, et mes flammes discrètes[2]
Doivent un tel respect aux lois que vous me faites,
515Que pour leur obéir mes sentiments domptés
N’osent plus se régler que sur vos volontés.

PHYLIS.

J’aime des serviteurs qui pour une maîtresse
Souffrent ce qui leur nuit, aiment ce qui les blesse.
Si tu vois quelque jour tes feux récompensés,
520Souviens-toi… Qu’est-ce-ci ? Cléandre, vous passez ?

(Cléandre va pour entrer chez Angélique, et Phylis l’arrête[3].)



Scène VII.

CLÉANDRE, PHYLIS, LYSIS.
CLÉANDRE.

Il me faut bien passer, puisque la place est prise.

PHYLIS.

Venez ; cette raison est de mauvaise mise.
D’un million d’amants je puis flatter les vœux[4],
Et n’aurois pas l’esprit d’en entretenir deux ?

  1. Var. Je souffrirois plutôt cinquante amants qu’un frère. (1637)
  2. Var. Vous êtes ma maîtresse, et moi, sous votre empire,
    Je dois suivre vos lois, et non y contredire (a),
    Et pour vous obéir mes sentiments domptés
    Se règlent seulement dessus vos volontés.
    PHYL. J’aime des serviteurs avec cette souplesse,
    Et qui peuvent aimer en moi ce qui les blesse. (1637-57)

    (a) Je dois suivre vos lois, encor que j’en soupire. (1644-57)

  3. Les mots : et Phylis l’arrête, manquent dans l’édition de 1637.
  4. Var. D’un million d’amants je puis nourrir les feux. (1637-57)