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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/282

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Tu cours à ta ruine, et vas tout hasarder
Sur la foi d’un amant qui n’en sauroit garder[1].

855Je me trompe, il n’est point volage ;
J’ai vu sa fermeté, j’en ai cru ses soupirs ;
Et si je flatte mes desirs,
Une si douce erreur n’est qu’à mon avantage.
Me manquât-il de foi, je la lui dois garder,
860Et pour perdre Doraste il faut tout hasarder.

ALIDOR, sortant de la porte d’Angélique, et repassant sur le théâtre.

Cléandre, elle est à toi ; j’ai fléchi son courage.
Que ne peut l’artifice, et le fard du langage ?
Et si pour un ami ces effets je produis,
Lorsque j’agis pour moi, qu’est-ce que je ne puis ?



Scène VII.

PHYLIS.

865Alidor à mes yeux sort de chez Angélique[2],
Comme s’il y gardoit encor quelque pratique ;
Et même, à son visage, il semble assez content.
Auroit-il regagné cet esprit inconstant ?
Oh ! qu’il feroit bon voir que cette humeur volage
870Deux fois en moins d’une heure eût changé de courage !
Que mon frère en tiendroit, s’ils s’étoient mis d’accord[3] !
Il faut qu’à le savoir je fasse mon effort.
Ce soir, je sonderai les secrets de son âme ;
Et si son entretien ne me trahit sa flamme,

  1. Var. Sur la foi de celui qui n’en sauroit garder. (1637-57)
  2. Var. D’où provient qu’Alidor sort de chez Angélique ?
    Auroit-il avec elle encor quelque pratique ?
    Son visage n’a rien que d’un homme content. (1637-57)
  3. Var. Que mon frère en tiendroit, s’ils étoient mis d’accord ! (1657)