Suis-je encore Alidor après ces sentiments ?
Et ne pourrai-je enfin régler mes mouvements ?
Vaine compassion des douleurs d’Angélique,
Qui penses triompher d’un cœur mélancolique[1] !
Téméraire avorton d’un impuissant remords,
Va, va porter ailleurs tes débiles efforts.
Après de tels appas, qui ne m’ont pu séduire,
Qui te fait espérer ce qu’ils n’ont su produire ?
Pour un méchant soupir que tu m’as dérobé,
Ne me présume pas tout à fait succombé[2] :
Je sais trop maintenir ce que je me propose,
Et souverain sur moi, rien que moi n’en dispose.
En vain un peu d’amour me déguise en forfait
Du bien que je me veux le généreux effet :
De nouveau, j’y consens, et prêt à l’entreprendre…
Scène VI.
Je demande pardon de t’avoir fait attendre,
D’autant qu’en l’escalier on faisoit quelque bruit,
Et qu’un peu de lumière en effaçoit la nuit :
Je n’osais avancer, de peur d’être aperçue[3].
Allons, tout est-il prêt ? Personne ne m’a vue :
De grâce, dépêchons, c’est trop perdre de temps,
Et les moments ici nous sont trop importants ;
Fuyons vite, et craignons les yeux d’un domestique.
Quoi ! tu ne réponds point à la voix d’Angélique ?