Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/308

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En un mot, tu sauras qu’en cet enlèvement
Mes larmes m’ont acquis Cléandre pour amant :
1370Son cœur m’est demeuré pour peine de son crime,
Et veut changer un rapt en amour légitime[1].
Il fait tous ses efforts pour gagner mes parents,
Et s’il les peut fléchir, quant à moi, je me rends ;
Non, à dire le vrai, que son objet me tente[2] ;
1375Mais mon père content, je dois être contente.
Tandis, par la fenêtre ayant vu ton retour,
Je t’ai voulu sur l’heure apprendre cet amour,
Pour te tirer de peine et rompre ta colère.

DORASTE.

Crois-tu que cet hymen puisse me satisfaire ?

PHYLIS.

1380Si tu n’es ennemi de mes contentements,
Ne prends mes intérêts que dans mes sentiments[3] ;
Ne fais point le mauvais, si je ne suis mauvaise,
Et ne condamne rien à moins qu’il me déplaise[4].
En cette occasion, si tu me veux du bien,
1385C’est à toi de régler ton esprit sur le mien[5].
Je respecte mon père, et le tiens assez sage
Pour ne résoudre rien à mon désavantage.
Si Cléandre le gagne, et m’en peut obtenir,
Je crois de mon devoir…

LYCANTE.

Je crois de mon devoir…Je l’aperçois venir.
1390Résolvez-vous, monsieur, à ce qu’elle desire.

  1. Var. Et veut faire d’un rapt un amour légitime. (1637-57)
  2. Var. Non pas, à dire vrai, que son objet me tente,
    Mais, mon père content, je suis assez contente. (1637-57)
  3. Ce vers a été omis par erreur dans l’édition de 1682.
  4. Var. Eh quoi ! ce qui me plaît, faut-il qu’il te déplaise ? (1637-57)
  5. Var. Règle, plus modéré, ton esprit sur le mien. (1637-57)