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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/333

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Scène V

Orphise, Florine

Orphise

Comment vous trouvez-vous d’avoir fait la coquette ?

Vous avez tant de grâce à souffrir un refus,

Que personne après vous ne s’en mêlera plus.

Les filles donc ainsi perdent la retenue !

Et depuis quand la mode en est-elle venue ?

Vous vous offrez vous-même ; ah ! j’en rougis pour vous.

Florine

Mille s’offrent à moi, que je dédaigne tous.

Si je fuis tant d’amants dont je suis recherchée,

J’en puis rechercher un, quand mon âme est touchée :

Un peu d’amour sied bien après tant de mépris.

Orphise

Un cœur se défend mal quand il est sitôt pris,

Et pour dire en un mot tout ce que je soupçonne,

Qui peut en prier un n’en refuse personne.

Florine

Orphise, quelle humeur est la vôtre aujourd’hui,

Que par vos sentiments vous jugez ceux d’autrui ?

Orphise

On vous connaît assez, et vous êtes de celles

Que mille fois le plâtre a fait passer pour belles ;

Dont la vertu consiste en de vains ornements ;

Qui changent tous les jours de rabats et d’amants :

Leurs inclinations ne tendent qu’à la bourse ;

C’est là de leurs désirs et le but et la source.

Voyez-les dans un temple importuner les Dieux,

Les prières en main, la modestie aux yeux ;

Il n’est trait de pudeur qu’elles ne contrefassent,

Et Dieu sait comme alors les dupes s’embarrassent.

Elles savent souvent jeter mille