Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/334

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hameçons

Et se rendre au besoin en diverses façons.

Après tout, je vous plains ; ce courage farouche

Ne vous est échappé qu’à faute d’une mouche :

Encore un assassin, vous lui perciez le cœur ;

Le fard déplaît sans doute à ce fâcheux vainqueur,

Et rend votre beauté tellement éclatante

Que son esprit bizarre en a pris l’épouvante.

Florine

Je ne connus jamais ce que vous m’imputez,

Et ne veux point répondre à tant de faussetés.

Ma vie est innocente, et ma beauté naïve

Ne doit qu’à ses attraits les cœurs qu’elle captive.

Si j’ai quelques défauts, ils ne sont point cachés

Sous le fard éclatant que vous me reprochez ;

Et quand bien le reproche en serait légitime,

Orphise, d’un nom d’art feriez-vous un grand crime ?

Jamais une beauté ne se doit négliger :

Quand la nature manque, il la faut corriger.

Est-ce honte d’aller par ces métamorphoses

À la perfection où tendent toutes choses ?

La raison, la nature et l’art en font leur but ;

L’amour, roi de nos cœurs, veut ces soins pour tribut,

Et tient pour bon sujet un esprit qui n’aspire

Qu’à trouver les moyens d’agrandir son empire.

C’est gloire de mourir pour ce maître des Dieux

Qui s’est privé pour vous de l’usage des yeux.

Si pour lui se défaire est un vrai sacrifice,

Se refaire pour lui, le nommez-vous un vice ?

Ce qu’on fait pour lui plaire, osez-vous le blâmer ?

Orphise, quand on aime, il se faut faire aimer.

L’amour seul de l’amour est le prix véritable,

Et pour se faire aimer, il faut se faire