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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/468

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454 L’ILLUSION.


Adraste.

 La grandeur de mes maux vous étant si connue,
Me refuserez-vous la pitié qui m’est due ?

Isabelle.

Certes j’en ai beaucoup, et vous plains d’autant plus
Que je vois ces tourments tout à fait superflus,
Et n’avoir pour tout fruit d’une longue souffrance
Que l’incommode honneur d’une triste constance.

Adraste.

Un père l’autorise, et mon feu maltraité
Enfin aura recours à son autorité.

Isabelle.

Ce n’est pas le moyen de trouver votre conte ;
Et d’un si beau dessein vous n’aurez que la honte.

Adraste.

J’espère voir pourtant, avant la fin du jour,
Ce que peut son vouloir au défaut de l’amour.

Isabelle.

Et moi, j’espère voir, avant que le jour passe,
Un amant accablé de nouvelle disgrâce.

Adraste.

Eh quoi ! cette rigueur ne cessera jamais ?

Isabelle.

Allez trouver mon père, et me laissez en paix.

Adraste.

Votre âme, au repentir de sa froideur passée,
Ne la veut point quitter sans être un peu forcée :
J’y vais tout de ce pas, mais avec des serments
Que c’est pour obéir à vos commandements.

Isabelle.

Allez continuer une vaine poursuite.


 1. Var. Que je vois ces tourments passer pour superflus. (1639-57)
2. Conte, compte. Voyez tome I, p. 150, note 1.