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ACTE II, SCÈNE IV. 455



Scène IV

Matamore, Isabelle, Clindor.
Matamore.

Eh bien ! dès qu’il m’a vu, comme a-t-il pris la fuite ?
M’a-t-il bien su quitter la place au même instant ?

Isabelle.

Ce n’est pas honte à lui, les rois en font autant,
Du moins si ce grand bruit qui court de vos merveilles
N’a trompé mon esprit en frappant mes oreilles.

Matamore.

Vous le pouvez bien croire ; et pour le témoigner,
Choisissez en quels lieux il vous plaît de régner :
Ce bras tout aussitôt vous conquête un empire ;
J’en jure par lui-même, et cela c’est tout dire.

Isabelle.

Ne prodiguez pas tant ce bras toujours vainqueur ;
Je ne veux point régner que dessus votre cœur :
Toute l’ambition que me donne ma flamme,
C’est d’avoir pour sujets les désirs de votre âme.

Matamore.

Ils vous sont tout acquis, et pour vous faire voir
Que vous avez sur eux un absolu pouvoir,
Je n’écouterai plus cette humeur de conquête ;
Et laissant tous les rois leurs couronnes en tête,
J’en prendrai seulement deux ou trois pour valets,
Qui viendront à genoux vous rendre mes poulets.

Isabelle.

L’éclat de tels suivants attireroit l’envie


 1. Var. Au moins si ce grand bruit qui court de vos merveilles. (1639-57)
2. L’impression de 1682 porte, mais à tort : "Que nous avons. » Notre texte : « Que vous avez, » est celui de toutes les autres éditions qui ont paru
du vivant de Corneille, et de celle que Thomas a publiée en 1692.