Aller au contenu

Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/484

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

470 L'ILLUSI0N.


Scène III

Géronte, Matamore, Clindor
Matamore, à Clindor.

 Ne doit-on pas avoir pitié de ma fortune ?
Le grand vizir encor de nouveau m’importune ;
Le Tartare, d’ailleurs, m’appelle à son secours ;
Narsingue et Calicut m’en pressent tous les jours :
Si je ne les refuse, il me faut mettre en quatre.

Clindor.

Pour moi, je suis d’avis que vous les laissiez battre :
Vous emploieriez trop mal vos invincibles coups,
Si pour en servir un vous faisiez trois jaloux.

Matamore

Tu dis bien : c’est assez de telles courtoisies ;
Je ne veux qu’en amour donner des jalousies.
xx Ah ! Monsieur, excusez, si, faute de vous voir,
Bien que si près de vous, je manquois au devoir.
Mais quelle émotion paroît sur ce visage ?
Où sont vos ennemis, que j’en fasse carnage ?

Géronte

Monsieur, grâces aux Dieux, je n’ai point d’ennemis.

Matamore

Mais grâces à ce bras qui vous les a soumis.

Géronte

C’est une grâce encor que j’avais ignorée.

Matamore

Depuis que ma faveur pour vous s’est déclarée,
Ils sont tous morts de peur, ou n’ont osé branler.


 1. Var. N’auras-tu point enfin pitié de ma fortune ? (1639-57)
2. Ce sont les noms de deux anciens royaumes de la presqu’île occidentale de l’Hindoustan.
3. Var. Où sont vos ennemis, que j’en fasse un carnage ? (1639-60)
4.On lit fureur, pour faveur, dans l’édition de 1657.