Et l’offenseur le père de Chimène !
Que je sens de rudes combats !
Contre mon propre honneur mon amour s’intéresse :
Il faut venger un père, et perdre une maîtresse :
L’un m’anime le cœur, l’autre retient mon bras[1].
Réduit au triste choix ou de trahir ma flamme,
Ou de vivre en infâme,
Des deux côtés mon mal est infini.
Ô Dieu, l’étrange peine !
Faut-il laisser un affront impuni ?
Faut-il punir le père de Chimène ?
Père, maîtresse, honneur, amour,
Noble et dure contrainte, aimable tyrannie[2],
Tous mes plaisirs sont morts, ou ma gloire ternie.
L’un me rend malheureux, l’autre indigne du jour.
Cher et cruel espoir d’une âme généreuse,
Mais ensemble amoureuse,
Digne ennemi de mon plus grand bonheur[3],
Fer qui causes ma peine[4],
M’es-tu donné pour venger mon honneur ?
M’es-tu donné pour perdre ma Chimène ?
Il vaut mieux courir au trépas.
Je dois à ma maîtresse aussi bien qu’à mon père :
- ↑ Var. L’un échauffe mon cœur, l’autre retient mon bras. (1637-55)
- ↑ Var. Illustre tyrannie, adorable contrainte,
Par qui de ma raison la lumière est éteinte,
À mon aveuglement rendez un peu de jour (a). (1637 in-4o P. et 44 in-12)
Var. Impitoyable loi, cruelle tyrannie. (1637 in-12, 38 et 44 in-4o)
(a) Tel est le texte des deux éditions in-4o de 1637 qui appartiennent à la Bibliothèque impériale. L’édition de l’Institut et celle de la Bibliothèque de Versailles sont, pour ces trois vers, conformes à l’édition de 1682. - ↑ Var. Noble ennemi de mon plus grand bonheur. (1637-48)
- ↑ Var. Qui fais toute ma peine. (1637-56)