Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 3.djvu/359

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VALÈRE.

Sire, puisque le ciel entre les mains des rois
Dépose sa justice et la force des lois,
Et que l’État demande aux princes légitimes
Des prix pour les vertus, des peines pour les crimes,
Souffrez qu’un bon sujet vous fasse souvenir
Que vous plaignez beaucoup ce qu’il vous faut punir ;
Souffrez…

LE VIEIL HORACE.

Souffrez…Quoi ? Qu’on envoie un vainqueur au supplice ?

TULLE.

Permettez qu’il achève, et je ferai justice :
J’aime à la rendre à tous, à toute heure, en tout lieu.
C’est par elle qu’un roi se fait un demi-dieu ;
Et c’est dont je vous plains, qu’après un tel service
On puisse contre lui me demander justice.

VALÈRE.

Souffrez donc, ô grand Roi, le plus juste des rois,
Que tous les gens de bien vous parlent par ma voix.
Non que nos cœurs jaloux de ses honneurs s’irritent ;
S’il en reçoit beaucoup, ses hauts faits[1] le méritent[2] ;
Ajoutez-y plutôt que d’en diminuer :
Nous sommes tous encor prêts d’y contribuer ;
Mais puisque d’un tel crime il s’est montré capable,
Qu’il triomphe en vainqueur, et périsse en coupable.
Arrêtez sa fureur, et sauvez de ses mains,
Si vous voulez régner, le reste des Romains :
Il y va de la perte ou du salut du reste.
Il La guerre avoit un cours si sanglant, si funeste[3],

  1. On lit les hauts faits, pour ses hauts faits, dans l’édition de 1682. — L’édition de 1655 A. porte : « ses beaux faits. »
  2. L’édition de 1682 et celle de 1655 A. sont les seules qui aient le méritent ; toutes les autres portent : les méritent.
  3. Var. Vu le sang qu’a versé cette guerre funeste,
    ----Var.Et tant de nœuds d’hymen dont nos heureux destins