Et toutefois le seul qui dans Rome peut plaire.
Cette haine des rois, que depuis cinq cents ans
Avec le premier lait sucent tous ses enfants,
Pour l’arracher des cœurs, est trop enracinée.
Oui, Seigneur, dans son mal Rome est trop obstinée ;
Son peuple, qui s’y plaît, en fuit la guérison :
Sa coutume l’emporte, et non pas la raison ;
Et cette vieille erreur, que Cinna veut abattre,
Est une heureuse erreur dont il est idolâtre[1],
Par qui le monde entier, asservi sous ses lois,
L’a vu cent fois marcher sur la tête des rois,
Son épargne s’enfler du sac de leurs provinces.
Que lui pouvaient de plus donner les meilleurs princes ?
J’ose dire, seigneur, que par tous les climats
Ne sont pas bien reçus toutes sortes d’États ;
Chaque peuple a le sien conforme à sa nature,
Qu’on ne sauroit changer sans lui faire une injure :
Telle est la loi du ciel, dont la sage équité
Sème dans l’univers cette diversité.
Les Macédoniens aiment le monarchique[2],
Et le reste des Grecs la liberté publique ;
Les Parthes, les Persans veulent des souverains ;
Et le seul consulat est bon pour les Romains.
Il est vrai que du ciel la prudence infinie[3]
- ↑ Var. Est une heureuse erreur dont elle est idolâtre,
Par qui le monde entier, rangé dessous ses lois. (1643-56) - ↑ L’édition de 1655 porte : « la monarchique. »
- ↑ Var. S’il est vrai que du ciel la prudence infinie. (1643-56)
est le pire fléau dont Dieu afflige un État quand il veut le châtier. » Voyez les Notes sur la vie de Corneille, que M. Édouard Fournier a placées en tête de sa comédie de Corneille à la Butte Saint-Roch (p. cxx)