Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 3.djvu/434

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CINNA.

Ami, n’accable plus un esprit malheureux
Qui ne forme qu’en lâche un dessein généreux[1].
Envers nos citoyens je sais quelle est ma faute,
Et leur rendrai bientôt tout ce que je leur ôte ;
Mais pardonne aux abois d’une vieille amitié, 855
Qui ne peut expirer sans me faire pitié,
Et laisse-moi, de grâce, attendant Émilie,
Donner un libre cours à ma mélancolie.
Mon chagrin t’importune, et le trouble où je suis
Veut de la solitude à calmer tant d’ennuis.860

MAXIME.

Vous voulez rendre compte à l’objet qui vous blesse
De la bonté d’Octave et de votre foiblesse ;
L’entretien des amants veut un entier secret.
Adieu : je me retire en confident discret.


Scène III.

CINNA.

Donne un plus digne nom au glorieux empire[2]865
Du noble sentiment que la vertu m’inspire,
Et que l’honneur oppose au coup précipité
De mon ingratitude et de ma lâcheté ;
Mais plutôt continue à le nommer foiblesse[3],
Puisqu’il devient si foible auprès d’une maîtresse, 870
Qu’il respecte un amour qu’il devroit étouffer,
Ou que, s’il le combat, il n’ose en triompher[4].
En ces extrémités quel conseil dois-je prendre ?

  1. Var. Qui même fait en lâche un acte généreux. (1643-64)
  2. Var. Que tu sais mal nommer le glorieux empire. (1643-56)
  3. Var. Mais plutôt qu’à bon droit tu le nommes foiblesse. (1643-56)
  4. Var. Ou s’il l’ose combattre, il n’ose en triompher. (1643)
    Var. Et que s’il le combat, il n’ose en triompher. (1648-64)