Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 3.djvu/69

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l’observateur, à cause qu’il vous a témoigné approuver cinq ou six mauvaises pièces rimées que vous dites avoir faites ? Jeune homme, assurez votre jugement devant que de l’exposer à la censure publique, et ne hasardez plus de libelles sans les avoir communiqués à d’autres moins passionnés que l’observateur. J’avoue qu’il vous doit beaucoup, mais il eût pu choisir un plus juste instrument de ses louanges que vous. Il est peu curieux de sa réputation. Je commence à désespérer de son parti, puisqu’il l’abandonne à des personnes qui le savent si mal soutenir ; c’est une preuve certaine de la fausseté d’une affaire, quand elle tombe entre les mains d’un ignorant. Aussi n’avons-nous point vu d’autres personnes embrasser ses intérêts. Claveret a été le premier qui s’est éveillé, qui dans ses plus grandes ambitions n’a jamais prétendu au delà de sommelier dans une médiocre maison : encore je lui fais beaucoup d’honneur. Celui que j’attaque est un peu plus fortuné de biens ; mais il faut apporter de la foi quand il s’agit de son origine (j’aime mieux paroître obscur que médisant). Il eût pu réussir du temps des comparaisons ; sa misérable éloquence me fait pitié, je ne peux consentir qu’un tel personnage se veuille dire du nombre des auteurs et qu’il se mêle aujourd’hui de juger de la bonté ou de la fausseté d’une pièce. Voyez le raisonnement de ce visage, il se vante de vouloir guérir des idolâtres. Monsieur le médecin, vous apportez de fort mauvais remèdes ; et si vous étiez aussi peu versé dans le reste de votre doctrine, il est périlleux de tomber entre vos mains. Vous avez produit de si mauvaises raisons que vous n’avez pas commencé à me persuader, bien éloigné de me convaincre. Si vous me priez, je donnerai quelque chose à l’obligation que vous avez à la maison de M. de Scudéry. Puisque vous portez ses intérêts au delà d’un homme désintéressé, il paroît que vous en avez reçu quelque sensible plaisir. Il est vrai que vous êtes de sa maison, et que vous assistez souvent aux conférences qui s’y traitent : vous n’en revenez point qu’avec de nouvelles lumières ; et ce grand amas de belles figures que vous prostituez dans votre petit papier, valent bien que vous l’en remerciiez ; mais gardez bien qu’en voulant fuir le vice de méconnoissant, vous ne choquiez absolument la plus saine partie du monde. M. de Corneille a satisfait tout le monde raisonnable ; vous avez affecté avec trop