Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/30

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Sed regnantis, erat. Nil belli jure poposcit ;
Quæque dari voluit, voluit sibi posse negari.
Immodicas possedit opes, sed plura retentis
Intulit ; invasit ferrum, sed ponere norat.
Prætulit arma togæ, sed pacem armatus amavit.
Juvit sumpta ducem, juvit[1] dimissa potestas.
Casta domus, luxuque carens, corruptaque nunquam
Fortuna domini. Clarum et venerabile nomen
Gentibus, et multum nostræ quod proderat urbi.
Olim vera fides, Sylla Marioque receptis
Libertatis obit ; Pompeio rebus adempto
Nunc et ficta perit ; Non jam regnare pudebit ;
Nec color imperii, nec frons erit ulla senatus.
O felix, cui summa dies fuit obvia victo,
Et cui quærendos Pharium scelus obtulit enses !

    Il fut chef du sénat, mais du sénat encore
    Et maître du couchant et maître de l’aurore.
    Il ne s’établit point sur le droit des combats.
    Ce qu’il pût autrefois ne devoir qu’à son bras,
    Qu’à ce courage grand sur les plus grands courages,
    Il voulut le devoir à de libres suffrages.
    Les progrès éclatants de sa jeune saison
    Ont enrichi l’État bien plus que sa maison.
    Il sut prendre, au besoin, ou mettre bas les armes ;
    Il adoroit la paix au milieu des alarmes ;
    Et d’un visage égal il a pris ou quitté
    L’éclat de la puissance et de l’autorité.
    On n’a vu ses trésors que dedans ses largesses :
    Sa maison étoit chaste au milieu des richesses ;
    Toujours la modestie et toujours la candeur
    S’y trouvèrent d’accord avecque la grandeur.
    Son nom fut précieux aux nations diverses,
    Et pour nous d’un grand poids au fort de nos traverses.
    Les remords de la honte et l’instinct du devoir
    Ne sont plus un obstacle au souverain pouvoir ;
    Le bonheur des forfaits est un droit légitime,
    Et la vertu gémit sous le pouvoir du crime.
    Ton malheur, grand héros, te doit être bien cher,
    De trouver une mort qu’il te falloit chercher ;
    D’accourcir ta douleur pour ne voir pas la nôtre,

  1. Par une erreur typographique qui fait une faute de quantité, il y a ici juvat, au lieu de juvit, dans les éditions de 1648 et de 1652.