Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/332

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CLÉANDRE.

535Si je l’ai plaint tantôt de souffrir pour mon crime,
Cette pitié, ma sœur, étoit bien légitime ;
Mais ce n’est plus pitié, c’est obligation,
Et le devoir succède à la compassion.
Nos plus puissants secours ne sont qu’ingratitude ;
540Mets à les redoubler ton soin et ton étude[1] ;
Sous ce même prétexte et ces déguisements,
Ajoute à ton argent perles et diamants ;
Qu’il ne manque de rien ; et pour sa délivrance
Je vais de mes amis faire agir la puissance.
545Que si tous leurs efforts ne peuvent le tirer[2],
Pour m’acquitter vers lui j’irai me déclarer.
Adieu : de ton côté prends souci de me plaire,
Et vois ce que tu dois à qui te sauve un frère.

MÉLISSE.

Je vous obéirai très-ponctuellement.


Scène III.

MÉLISSE, LYSE.
LYSE.

550Vous pouviez dire encore très-volontairement ;
Et la faveur du ciel vous a bien conservée,
Si ces derniers discours ne vous ont achevée.
Le parti de Philiste a de quoi s’appuyer ;
Je n’en suis plus, Madame : il n’est bon qu’à noyer ;
555Il ne valut jamais un cheveu de Dorante.
Je puis vers la prison apprendre une courante[3] ?

  1. Var. Donc à les redoubler mets toute ton étude. (1645-56)
  2. Var. Que si tous leurs efforts ne le peuvent tirer. (1645-56)
  3. C’est-à-dire courir à la prison, m’y rendre en courant. Voyez le Lexique.