Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/476

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

LAONICE.

Madame, au nom des Dieux, veuillez m’en dispenser :
C’est assez que pour vous je lui sois infidèle,
780Sans m’engager encor à des conseils contre elle.
Oronte est avec vous, qui, comme ambassadeur,
Devait de cet hymen honorer la splendeur ;
Comme c’est en ses mains que le Roi votre frère
A déposé le soin d’une tête si chère,
785Je vous laisse avec lui pour en délibérer :
Quoi que vous résolviez, laissez-moi l’ignorer.
Au reste, assurez-vous de l’amour des deux princes :
Plutôt que de vous perdre ils perdront leurs provinces ;
Mais je ne réponds pas que ce cœur inhumain
790Ne veuille à leur refus s’armer d’une autre main.
Je vous parle en tremblant : si j’étois ici vue,
Votre péril croîtroit, et je serois perdue.
Fuyez, grande princesse, et souffrez cet adieu.

RODOGUNE.

Va, je reconnoîtrai ce service en son lieu.


Scène II.

RODOGUNE, ORONTE.
RODOGUNE.

795Que ferons-nous, Oronte, en ce péril extrême,
Où l’on fait de mon sang le prix d’un diadème ?
Fuirons-nous chez mon frère ? attendrons-nous la mort,
Ou ferons-nous contre elle un généreux effort ?

ORONTE.

Notre fuite, Madame, est assez difficile :
800J’ai vu des gens de guerre épandus par la ville[1].

  1. Var. J’ai vu les gens de guerre épandus par la ville. (1660)