Et si tantôt leur haine eût attendu nos larmes,
Leur haine à nos douleurs auroit rendu les armes.
Pleurez donc à leurs yeux, gémissez, soupirez,
Et je craindrai pour vous ce que vous espérez.
Quoi qu’en votre faveur vos pleurs obtiennent d’elles,
Il vous faudra parer leurs haines mutuelles ;
Sauver l’une de l’autre ; et peut-être leurs coups,
Vous trouvant au milieu, ne perceront que vous :
C’est ce qu’il faut pleurer. Ni maîtresse ni mère
N’ont plus de choix ici ni de lois à nous faire[1] :
Quoi que leur rage exige ou de vous ou de moi,
Rodogune est à vous, puisque je vous fais roi.
Épargnez vos soupirs près de l’une et de l’autre[2].
J’ai trouvé mon bonheur, saisissez-vous du vôtre :
Je n’en suis point jaloux ; et ma triste amitié
Ne le verra jamais que d’un œil de pitié.
Scène VI.
Lorsqu’il ne veut pas voir le mal qu’il se veut faire,
Mon amitié s’oppose à son aveuglement :
Elle agira pour vous, mon frère, également,
Elle n’abusera point de cette violence
Que l’indignation fait à votre espérance.
La pesanteur du coup souvent nous étourdit :
On le croit repoussé quand il s’approfondit ;