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ACTE IV.


Scène première.

ANTIOCHUS, RODOGUNE.
RODOGUNE.

Prince, qu’ai-je entendu ? parce que je soupire,
Vous présumez que j’aime, et vous m’osez le dire !
Est-ce un frère, est-ce vous dont la témérité[1]
S’imagine…

ANTIOCHUS.

S’imagine…Apaisez ce courage irrité,
1135Princesse ; aucun de nous ne seroit téméraire
Jusqu’à s’imaginer qu’il eût l’heur de vous plaire :
Je vois votre mérite et le peu que je vaux,
Et ce rival si cher connoît mieux ses défauts.
Mais si tantôt ce cœur parloit par votre bouche,
1140Il veut que nous croyions qu’un peu d’amour le touche,
Et qu’il daigne écouter quelques-uns de nos vœux,
Puisqu’il tient à bonheur d’être à l’un de nous deux.
Si c’est présomption de croire ce miracle,
C’est une impiété de douter de l’oracle,
1145Et mériter les maux où vous nous condamnez,
Qu’éteindre un bel espoir que vous nous ordonnez.
Princesse, au nom des Dieux, au nom de cette flamme…

  1. Var. Qui de vous deux encore a la témérité
    De se croire… (1667-56)