Vos larmes dans mon cœur ont trop d’intelligence ;
Elles ont presque éteint cette ardeur de vengeance.
Je ne puis refuser des soupirs à vos pleurs ;
Je sens que je suis mère auprès de vos douleurs.
C’est en fait, je me rends, et ma colère expire :
Rodogune est à vous aussi bien que l’empire.
Rendez grâces aux Dieux qui vous ont fait l’aîné,
Possédez-la, régnez.
Ô trop heureuse fin de l’excès de ma peine[1] !
Je rends grâces aux Dieux qui calment votre haine ;
Madame, est-il possible ?
La nature est trop forte, et mon cœur s’est dompté[2].
Je ne vous dis plus rien, vous aimez votre mère,
Et votre amour pour moi taira ce qu’il faut taire.
La main qui me blessoit a daigné me guérir !
Oui, je veux couronner une flamme si belle.
Allez à la Princesse en porter la nouvelle ;
Son cœur comme le vôtre en deviendra charmé :
Vous n’aimeriez pas tant si vous n’étiez aimé.
Heureux Antiochus ! heureuse Rodogune !
Oui, Madame, entre nous la joie en est commune.
Allez donc ; ce qu’ici vous perdez de moments