Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 6.djvu/390

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Unissons ma vengeance à votre politique
Pour sauver des abois toute la République :
L’Hymen seul peut unir des intérêts si grands.
Je sais que c’est beaucoup que ce que je prétends,
Mais dans ce dur exil que mon Tyran m’impose,
Le rebut de Pompée est encore quelque chose,
Et j’ai des sentiments trop nobles, ou trop vains,
Pour le porter ailleurs qu’au plus grand des Romains.

Sertorius
Ce nom ne m’es pas dû, je suis…

Aristie
——————————————Ce que vous faites
Montre à tout l’Univers, Seigneur, ce que vous êtes ;
Mais quand même ce nom semblerait trop pour vous,
Du moins mon infidèle est un rang au-dessous.
Il sert dans son parti, vous commandez au vôtre,
Vous êtes chef de l’un, et lui sujet dans l’autre,
Et son divorce enfin qui m’arrache sa foi
L’y laisse par Sylla plus opprimé que moi,
Si votre Hymen s’élève à la grandeur sublime,
Tandis qu’en l’esclavage un autre hymen l’abîme.
Mais, Seigneur, je m’emporte, et l’excès d’un tel heur
Me fait vous en parler avec trop de chaleur.
Tout mon bien est encor dedans l’incertitude,
Je n’en conçois l’espoir qu’avec inquiétude,
Et je craindrai toujours d’avoir trop prétendu,
Tant que de cet espoir vous m’ayez répondu.
Vous me pouvez d’un mot assurez, ou confondre.

Sertorius
Mais, Madame, après tout, que puis-je vous répondre,
De quoi vous assurer, si vous-même parlez,
Sans être sûre encore de ce que vous voulez !