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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 6.djvu/453

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ACTE V, SCENE IV.

Du reste, ma personne est en votre puissance :
Vous êtes maître ici ; commandez, disposez,
Et recevez enfin ma main, si vous l’osez.

Perpenna.

Moi ! Si je l’oserai ? Vos conseils magnanimes
Pouvoient perdre moins d’art à m’étaler mes crimes :1790
J’en connois mieux que vous toute l’énormité,
Et pour la bien connoître ils m’ont assez coûté.
On ne s’attache point, sans un remords bien rude,
À tant de perfidie et tant d’ingratitude :
Pour vous je l’ai dompté, pour vous je l’ai détruit ;1795
J’en ai l’ignominie, et j’en aurai le fruit.
Menacez mes forfaits et proscrivez ma tête :
De ces mêmes forfaits vous serez la conquête ;
Et n’eût tout mon bonheur que deux jours à durer,
Vous n’avez dès demain qu’à vous y préparer.1800
J’accepte votre haine, et l’ai bien méritée ;
J’en ai prévu la suite, et j’en sais la portée.
Mon triomphe…


Scène V.

Perpenna, Aristie, Viriate, Aufide, Arcas, Thamire.
Aufide.

Mon triomphe…Seigneur, Pompée est arrivé,
Nos soldats mutinés, le peuple soulevé.
La porte s’est ouverte à son nom, à son ombre.1805
Nous n’avons point d’amis qui ne cèdent au nombre :
Antoine et Manlius[1], déchirés par morceaux,

  1. Corneille a emprunté à Plutarque les noms d’Antoine et de Manlius, aussi bien que celui d’Aufide (ci-dessus, p 364, note 1). Ce fut Antoine qui porta le premier coup à Sertorius. Voyez la Vie de Sertorius, chapitre xxvi.