Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 6.djvu/49

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365Et l’on pourroit donner à la nécessité
Ce qui n’est qu’un effet de ta légèreté.

GRIMOALD.

J’embrasse un bon avis, de quelque part qu’il vienne.
Unulphe, allez trouver la Reine, de la mienne,
Et tâchez par cette offre à vaincre sa rigueur.
370Madame, c’est à vous que je devrai son cœur ;
Et pour m’en revancher, je prendrai soin moi-même
De faire choix pour vous d’un mari qui vous aime,
Qui soit digne de vous, et puisse mériter
L’amour que, malgré moi, vous voulez me porter.

ÉDÜIGE.

375Traître, je n’en veux point que ta mort ne me donne,
Point qui n’ait par ton sang affermi ma couronne.

GRIMOALD.

Vous pourrez à ce prix en trouver aisément.
Remettez la princesse à son appartement,
Duc ; et tâchez à rompre un dessein sur ma vie
380Qui me feroit trembler si j’étais à Pavie.

ÉDÜIGE.

Crains-moi, crains-moi partout : et Pavie, et Milan,
Tout lieu, tout bras est propre à punir un tyran ;
Et tu n’as point de forts où vivre en assurance,
Si de ton sang versé je suis la récompense.

GRIMOALD.

385Dissimulez du moins ce violent courroux :
Je deviendrois tyran, mais ce seroit pour vous.

ÉDÜIGE.

Va, je n’ai point le cœur assez lâche pour feindre.

GRIMOALD.

Allez donc ; et craignez, si vous me faites craindre.

FIN DU PREMIER ACTE.