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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 6.djvu/631

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ACTE III, SCÈNE III.

960On ne sait ce qu’il vaut que sur sa bonne foi.
Je veux croire, en faveur des héros de sa race,
Qu’il en a les vertus, qu’il en suivra la trace,
Qu’il en égalera les plus illustres noms ;
Mais j’en croirois bien mieux de grandes actions.
965Si dans un long exil il a paru sans vice,
La vertu des bannis souvent n’est qu’artifice.
Sans vous avoir servi, vous l’avez ramené ;
Mais l’autre est le premier qui vous ait couronné ;
Dès qu’il vit deux partis, il se rangea du vôtre[1] :
970Ainsi l’un vous doit tout, et vous devez à l’autre.

GALBA.

Vous prendrez donc le soin de m’acquitter vers lui ;
Et comme pour l’empire il faut un autre appui,
Vous croirez que Pison est plus digne de Rome :
Pour ne plus en douter suffit que je le nomme.

CAMILLE.

975Pour Rome et son empire, après vous je le croi ;
Mais je doute si l’autre est moins digne de moi.

GALBA.

Doutez-en : un tel doute est bien digne d’une âme
Qui voudroit de Néron revoir le siècle infâme,
Et qui voyant qu’Othon lui ressemble le mieux…

CAMILLE.

980Choisissez de vous-même, et je ferme les yeux.
Que vos seules bontés de tout mon sort ordonnent :
Je me donne en aveugle à qui qu’elles me donnent.
Mais quand vous consultez Lacus et Martian,
Un époux de leur main me paroît un tyran ;


    qu’il l’appelle du sein du repos à ce rang suprême qu’il a lui-même obtenu par la guerre… Ut principatum… bello adeptus, quiescenti offeram. Plus loin, au chapitre xlviii du livre Ier des Histoires, Tacite nous apprend que Pison avait été longtemps exilé : diu exsul.

  1. Voyez plus haut, p. 576, vers 31 et suivants.