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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 6.djvu/634

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OTHON.

Après ce que pour vous l’amour me fait oser.
Ce que Galba pour moi prend le soin de vous dire…

OTHON.

1030Quoi donc, Madame ? Othon vous coûteroit l’empire ?
Il sait mieux ce qu’il vaut, et n’est pas d’un tel prix
Qu’il le faille acheter par ce noble mépris.
Il se doit opposer à cet effort d’estime
Où s’abaisse pour lui ce cœur trop magnanime,
1035Et par un même effort de magnanimité,
Rendre une âme si haute au trône mérité.
D’un si parfait amour quelles que soient les causes…

CAMILLE.

Je ne sais point, Seigneur, faire valoir les choses :
Et dans ce prompt succès dont nos cœurs sont charmés,
1040Vous me devez bien moins que vous ne présumez.
Il semble que pour vous je renonce à l’empire,
Et qu’un amour aveugle ait su me le prescrire.
Je vous aime, il est vrai ; mais si l’empire est doux,
Je crois m’en assurer quand je me donne à vous.
1045Tant que vivra Galba, le respect de son âge,
Du moins apparemment, soutiendra son suffrage :
Pison croira régner ; mais peut-être qu’un jour
Rome se permettra de choisir à son tour.
À faire un empereur alors quoi qui l’excite,
1050Qu’elle en veuille la race, ou cherche le mérite,
Notre union aura des voix de tous côtés,
Puisque j’en ai le sang, et vous les qualités.
Sous un nom si fameux qui vous rend préférable,
L’héritier de Galba sera considérable :
1055On aimera ce titre en un si digne époux,
Et l’empire est à moi, si l’on me voit à vous.

OTHON.

Ah ! Madame, quittez cette vaine espérance
De nous voir quelque jour remettre en la balance :