Mais où fuir un tyran que la bravade aigrit ?
Retournerai-je à Rome, où j’ai laissé mon frère
Enflammé contre moi de haine et de colère,
Et qui, sans la terreur d’un nom si redouté,
Jamais n’eût mis de borne à ma captivité ?
Moi qui prétends pour dot la moitié de l’empire…
Ce seroit d’un malheur vous jeter dans un pire[1].
Ne vous emportez pas contre vous jusque-là :
Il est d’autres moyens de braver Attila.
Épousez Valamir.
Que d’épouser un roi dont il fait son esclave ?
Mais vous l’aimez.
Je ne veux point de rois qu’on force d’obéir ;
Et si tu me dis vrai, quelque rang que je tienne,
Cet hymen pourroit être et sa perte et la mienne.
Mais je veux qu’Attila, pressé d’un autre amour,
Endure un tel insulte[2] au milieu de sa cour :
Ildione par là me verroit à sa suite ;
- ↑ Lorsque Boileau, quelques années plus tard, traduisait ce vers d’Horace (Art poétique, vers 31) :
In vitium ducit culpæ fuga, si caret arte,
par
Souvent la peur d’un mal nous conduit dans un pire
(Art poétique, chant I, vers 64),
il se rapprochait de Corneille au moins autant que de son modèle.
- ↑ Le genre du mot insulte était encore douteux. Voyez le Lexique. Voltaire
(1764) a ainsi modifié le vers ;
Endure telle insulte au milieu de sa cour.