Aller au contenu

Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 7.djvu/138

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
126
ATTILA.

À de honteux respects je m’y verrois réduite ;
Et le sang des Césars, qu’on adora toujours,
Feroit hommage au sang d’un roi de quatre jours !
Dis-le-moi toutefois : pencheroit-il vers elle ?
Que t’en a dit Octar ?

FLAVIE.

Que t’en a dit Octar ?Qu’il la trouve assez belle,430
Qu’il en parle avec joie, et fuit à lui parler.

HONORIE.

Il me parle, et s’il faut ne rien dissimuler,
Ses discours me font voir du respect, de l’estime,
Et même quelque amour, sans que le nom s’exprime.

FLAVIE.

C’est un peu plus qu’à l’autre.

HONORIE.

C’est un peu plus qu’à l’autre.Et peut-être bien moins.435

FLAVIE.

Quoi ? ce qu’à l’éviter il apporte de soins…

HONORIE.

Peut-être il ne la fuit que de peur de se rendre ;
Et s’il ne me fuit pas, il sait mieux s’en défendre.
Oui, sans doute, il la craint, et toute sa fierté
Ménage, pour choisir, un peu de liberté.440

FLAVIE.

Mais laquelle des deux voulez-vous qu’il choisisse ?

HONORIE.

Mon âme des deux parts attend même supplice :
Ainsi que mon amour, ma gloire a ses appas ;
Je meurs s’il me choisit, ou ne me choisit pas ;
Et… Mais Valamir entre, et sa vue en mon âme445
Fait trembler mon orgueil, enorgueillit ma flamme.
Flavie, il peut sur moi bien plus que je ne veux :
Pour peu que je l’écoute, il aura tous mes vœux.
Dis-lui… mais il vaut mieux faire effort sur moi-même.