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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 7.djvu/139

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ACTE II, SCÈNE II.

Scène II.

VALAMIR, HONORIE, FLAVIE.
HONORIE.

Le savez-vous, Seigneur, comment je veux qu’on m’aime ?450
Et puisque jusqu’à moi vous portez vos souhaits,
Avez-vous su connoître à quel prix je me mets ?
Je parle avec franchise, et ne veux point vous taire
Que vos soins me plairoient, s’il ne falloit que plaire ;
Mais quand cent et cent fois ils seroient mieux reçus,455
Il faut pour m’obtenir quelque chose de plus.
Attila m’est promis, j’en ai sa foi pour gage ;
La princesse des Francs prétend même avantage ;
Et bien que sur le choix il semble hésiter[1],
Étant ce que je suis j’aurois tort d’en douter.460
Mais qui promet à deux outrage l’une et l’autre[2].
J’ai du cœur, on m’offense, examinez le vôtre.
Pourrez-vous m’en venger, pourrez-vous l’en punir ?

VALAMIR.

N’est-ce que par le sang qu’on peut vous obtenir ?
Et faut-il que ma flamme à ce grand cœur réponde465
Par un assassinat du plus grand roi du monde,
D’un roi que vous avez souhaité pour époux ?
Ne sauroit-on sans crime être digne de vous ?

HONORIE.

Non, je ne vous dis pas qu’aux dépens de sa tête
Vous vous fassiez aimer, et payiez ma conquête.470
De l’aimable façon qu’il vous traite aujourd’hui

  1. Voyez tome IV, p. 190, la variante du vers 936 du Menteur, et le Lexique. — Voltaire (1764) a ajouté une syllabe :

    Et bien que sur le choix il me semble hésiter.
  2. Voltaire (1764) donne l’un et l’autre. Voyez plus loin le vers 605.