Aller au contenu

Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 7.djvu/140

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
128
ATTILA.

Il a trop mérité ces tendresses pour lui ;
D’ailleurs, s’il faut qu’on l’aime, il est bon qu’on le craigne.
Mais c’est cet Attila qu’il faut que je dédaigne.
Pourrez-vous hautement me tirer de ses mains,475
Et braver avec moi le plus fier des humains ?

VALAMIR.

Il n’en est pas besoin. Madame : il vous respecte,
Et bien que sa fierté vous puisse être suspecte,
À vos moindres froideurs, à vos moindres dégoûts,
Je sais que ses respects me donneroient à vous.480

HONORIE.

Que j’estime assez peu le sang de Théodose
Pour souffrir qu’en moi-même un tyran en dispose,
Qu’une main qu’il me doit me choisisse un mari,
Et me présente un roi comme son favori !
Pour peu que vous m’aimiez, Seigneur, vous devez croire485
Que rien ne m’est sensible à l’égal de ma gloire.
Régnez comme Attila, je vous préfère à lui ;
Mais point d’époux qui n’ose en dédaigner l’appui,
Point d’époux qui m’abaisse au rang de ses sujettes.
Enfin, je veux un roi : regardez si vous l’êtes,490
Et quoi que sur mon cœur vous ayez d’ascendant.
Sachez qu’il n’aimera qu’un prince indépendant.
Voyez à quoi, Seigneur, on connoît les monarques :
Ne m’offrez plus de vœux qui n’en portent les marques ;
Et soyez satisfait qu’on vous daigne assurer495
Qu’à tous les rois ce cœur voudroit vous préférer.


Scène III.

VALAMIR, FLAVIE.
VALAMIR.

Quelle hauteur, Flavie, et que faut-il qu’espère