Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 7.djvu/242

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ACTE III.


Scène première.

DOMITIAN, BÉRÉNICE, PHILON.
DOMITIAN.

Je vous l’ai dit, Madame, et j’aime à le redire,
Qu’il est beau qu’à vous plaire un empereur aspire,
Qu’il lui doit être doux qu’un véritable feu
Par de justes soupirs mérite votre aveu.
715Seroit-ce un crime à moins[1] ? Seroit-ce vous déplaire,
Après un empereur, de vous offrir son frère ?
Et voudriez-vous croire, en faveur de ma foi,
Qu’un frère d’empereur pourroit valoir un roi ?

BÉRÉNICE.

Si votre âme, Seigneur, en veut être éclaircie,
720Vous pouvez le savoir de votre Domitie.
De tous les deux aimée, et douce à tous les deux,
Elle sait mieux que moi comme on change de vœux,
Et sait peut-être mal la route qu’il faut prendre
Pour trouver le secret de les faire descendre,
725Quelque facilité qu’elle ait eue à trouver,
Malgré sa flamme et vous, l’art de les élever.
Pour moi, qui n’eus jamais l’honneur d’être Romaine,
Et qu’un destin jaloux n’a fait naître que reine,
Sans qu’un de vous descende au rang que je remplis,

  1. Tel est le texte des anciennes éditions, y compris celle de 1692. Voltaire a mis : « Serait-ce un crime à moi ? »