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PREFACE.

la Thonnine, qu’on peut manger en tout temps sans aucun peril.

Quelle méprise n’a-t-il point faite quand il a parlé du Tamarin, qui est un petit fruit aigrelet, ou une sorte de datte sauvage qui vient des Indes, & dont on se sert à divers usages dans la Medecine ? Voicy ce qu’il en a dit, en citant Dioscoride. Fruit à noyau que porte un arbre des Indes, semblable aux dattes. Il croist dans les eaux mortes. Il porte son fruit comme une fleur cotonnée. Il y en a de domestique & de sauvage. Le domestique porte son fruit comme une noix de galle. Dioscoride a dit tout cela, à l’exception de Fruit à noyau que porte un arbre des Indes, semblable aux dattes  ; mais il l’a dit du Tamarisc qu’il dit estre un arbre vulgaire, & connu de tous, & non pas du Tamarin, dont il n’a parlé en aucune sorte. Tamarin & Tamarisc sont deux choses differentes, & l’Académie Françoise les a tres-bien distinguées dans son Dictionnaire, en disant que le Tamarin est une sorte de datte sauvage qui vient des Indes Orientales, & le Tamarisc une sorte de plante, ou de petit arbre, dont le fruit, le bois & l’écorce servent à divers usages dans la Medecine. Ainsi le Tamarin n’est ny comme une fleur cotonnée ny comme une noix de galle, ce qui ne convient qu’au fruit du Tamarisc, comme l’a marqué Dioscoride. Les Tamarins, que l’on appelle aussi Tamarindes, sont des fruits qui viennent sur de grands arbres branchus dans des gousses brunes & tannées, & puisque Dioscoride n’en a rien dit non plus que de la Casse & des Girofles, il y a grande apparence que de son temps, qui estoit celuy d’Antoine & de Cleopatre, dont on tient qu’il fut le Medecin, le commerce dans les Indes n’estoit pas commun.

On seroit trop long si on rapportoit les autres fautes qu’on a remarquées dans cet Ouvrage, comme de dire que la Zedoaire est une graine, quoy que ce soit une racine, ainsi que tous les Auteurs en conviennent. Tant de personnes s’en sont apperceuës, qu’on en parleroit inutilement. Les plaintes qui en ont esté faites, & quantité de matieres traittées imparfaitement, ayant fait connoistre l’avantage que le Public pourroit recevoir d’un Dictionnaire des Arts & des Sciences qui fust & plus ample & plus correct, on resolut de s’appliquer sans aucun relâche à ramasser tout ce qui en a esté écrit jusqu’icy de plus curieux, afin que ceux qui souhaiteroient cette sorte de supplément à l’Ouvrage de l’Académie, eussent sujet d’estre satisfaits. C’est dans cette veuë qu’on a travaillé, & l’on peut dire qu’il n’y a point de matiere que l’on n’ait pris soin d’étendre, en y ajoûtant une infinité d’articles nouveaux qu’on ne trouve point dans le Dictionnaire, pretendu Universel.

On n’a rien cité d’aucun Auteur, qu’on n’ait consulté l’original, & c’est dans la source que l’on a puisé tout ce qu’on a dit des Plantes dont Dioscoride & Matthiole ont écrit. On ne s’est pas contenté d’en faire la description, on a crû devoir marquer quel en est l’usage, afin que l’utilité se trouve jointe au plaisir de la lecture, ce qui ne se trouve pas dans l’autre Dictionnaire. Le mesme motif a fait qu’on s’est étendu sur la Medecine, & le sçavant Ettmuller en a fourny de longues remarques.