Page:Corneille - Imitation de Jésus-Christ, édition 1862.djvu/401

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de peur que de la chair la dangereuse amorce,
le vieil homme, à l’esprit encor mal asservi,
se prévalant sur moi de toute ma foiblesse,
n’affermisse un empire à cette chair traîtresse,
et que par l’esprit même il ne soit trop suivi.

C’est contre cette chair, notre fière ennemie,
que tant que nous traînons cette ennuyeuse vie,
nous avons à combattre autant qu’à respirer.
Quelle est donc cette vie où tout n’est que misères,
que tribulations, que rencontres amères,
que piéges, qu’ennemis prêts à nous dévorer ?

Qu’une affliction passe, une autre lui succède :
souvent elle renaît de son propre remède,
et rentre du côté qu’on la vient de bannir ;
un combat dure encor, que mille autres surviennent,
et cet enchaînement dont ils s’entre-soutiennent
fait un cercle de maux, qui ne sauroit finir.

Peut-on avoir pour toi quelque amour, quelque estime,
ô vie, ô d’amertume affreux et vaste abîme,
cuisant et long supplice et de l’âme et du corps ?
Et parmi les malheurs dont je te vois suivie,