Page:Corneille - Imitation de Jésus-Christ, édition 1862.djvu/402

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à quel droit gardes-tu l’aimable nom de vie,
toi dont le cours funeste engendre tant de morts ?

On t’aime cependant, et la foiblesse humaine,
bien qu’elle voie en toi les sources de sa peine,
y cherche avidement celle de ses plaisirs.
Le monde est un pipeur, on dit assez qu’il trompe,
on déclame assez haut contre sa vaine pompe,
mais on ne laisse point d’y porter ses desirs.

Le pouvoir dominant de la concupiscence,
qu’imprime en notre chair notre impure naissance,
ainsi sous ce trompeur captive nos esprits ;
mais il faut que le cœur saintement se rebelle,
et juge quels motifs font aimer l’infidèle,
et quels doivent pousser à son juste mépris.

Les appétits des sens, la soif de l’avarice,
l’orgueil qui veut monter au gré de son caprice,
enfantent cet amour que nous avons pour lui ;
les angoisses d’ailleurs, les peines, les misères,
qui les suivent partout comme dignes salaires,
en font naître à leur tour le dégoût et l’ennui.