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8 LE CID

où des événements relativement récents ne pouvaient être dénaturés dans leur essence. Puis, la poésie n'est pas seule à garder le souvenir du Cid ; l'histoire nous dit aussi que du mariage d'une de ses filles aven un prince de Navarrf sortit toute une lignée de rois. L'un d'eux, Alphonse If Savant, en 1272, faisait ériger un beau monument à son aïeul prés de l'autel, dans le monastère de Saint-Pierre de Cardena, et y inscrivait une épitaphe latine où il le compa- rai! au roi Arthur et à Charlemagne. Longtemps après, en i541, Charles Quint le faisait rétablir à celte place d'honneur d'où l'avait fait écarter la nécessité de quelques travaux d'em- bellissement.. Philippe II alla plus loin : il chargea don Diego Hurtado de Mendoce, son ambassadeur à Rome, de solliciter du pape la canonisation du Cid ! 11 est regrettable que des soucis plus pressants aient fait oublier cette requête ; en apprenant les titres ignorés de Rodrigue à la sainteté, nous serions éclairés du même coup sur ses droits plus réels à l'existence historique.

Les historiens qui ont cru à cette existence (attestée d'ail- leurs par les injures même et le vivace ressentiment des chroniqueurs arabes autant que par les hyperboles des chro- niqueurs espagnols) n'ont donc fait que sui\Te une longue tra- dition, établie à la cour aussi bien que parmi le peuple. Vers les xni^ et xiv siècles, on trouve déjà la Cronica gênerai de Esjxma, dont l'auteur est peut-être le roi Alphonse le Savant, la Cronica del famoso cavallero Cid huy liiaz Campeador, la Genealogia del Cid Ruy Biaz, les G esta Roder ici DidactiCampi docti, découverts par le p. Risco, et publiés par lui dans son recueil biographique, la Castilla y el mos famoso Castellano (1792). Une autre biographie moderne est écrite par Quintana dans ses Vidas de Espanole célèbres. On peut citer enfin la Leben des Cid {iSOo), de Mûller, \d.Chronicle of the Cid (1808), de Southey, plus poétique, il est vrai, que critique, l'ouvrage plus sûr de Huber, Geschichte des Cid (1829), et surtout les savantes Recherches sur V histoire et la littérature de l'Espagne pendant le moyen âge, de M. Reinhart Dozy. professeur à l'Université de Leyde (1860).

Kn traduisant le Poème du Cid (1858), M. Damas-Hinard n'a <îu qu'à s'appuyer sur l'ensemble de ces témoignages histori- qu's i.t poétiques pour mettre hors de discussion l'existence reVIle du Cid. Mais en prouvant la réalité de cette existence il rHi-oniiaissail à quel point l'histoire différait de la légende: .< Le Cid, éirivait-il, est devenu peu à peu la personnification la plus noble, le type le plus élevé du caractère espagnol porté à sa plus haute expression. Ses compatriotes aimaient

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