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té LE CID

il faut un fauteuil pour le roi*. » Pour(juoi ces quatre portes? Sans doute pour préciser une convention théâtrale, qui vnul que cette chambre neutre, pour ainsi dire, donne accès à la fois dans l'appartement de Cliimène, dans celui de l'infante, dans celui du roi, et sur la place publique. Celait la conven- tion du décor simultané, familière à nos pères, mais depuis longtemps abolie. En apparence, l'action se passait dans la chambre de gauche ou le palais de droite ; « en realité, ellf s'agitait dans le proscenium, et il suffisait d'une indication matérielle quelconque pour que la pensée du public rattachât à l'un de ces endroits les mouvements de scène qui s'accom- plissaient à la rampe. Ainsi je suppose les portes du palais se fermant et l'acteur entrant par la gauche : cela voulait dire : l'action se transporte du palais dans la chambre que vous avez-là sous les yeux, à gauche... Il est probable iiu'en 1636, un décor simultané rendait raison de ces changements de lieu dans le Cid^. » Ce point nous paraît nettement établi par la critique même que Scudéi-y adresse au Cid : « Le théâtre est si mal entendu, qu'un même lieu représentant l'appartement du roi, celui de l'infante, la maison de Chimène et la rue, presque sans changer de face, le spectateur ne sait le plus souvent où en sont les acteurs^. » Mais le reproche de Scudéry prouve aussi que, dès 1636. la convention n'était plus universellement acceptée, ni comprise, et que Corneille ne pouvait pas se justifier par là, en face des Ihéorfes nou- velles qui prévalaient au théâtre.

Au reste, ainsi que le remarque M. Sarcey, la tradition du décor simultané dut bientôt disparaître devant une mode nouvelle qui s'introduisit au théâtre « vers les premières années du xvn^ siècle », celle de disposer de chaque côté du proscenium les bancs où se tenaient quelques spectateurs privi- légiés. Or, M. Despois"^ croit précisément que cette mode eut pour point de départ l'immense succès du Cid, et il appuie son affirmation sur la lettre célèbre de Mondory, l'acteur de la troupe du Marais, à Balzac :

« Je vous souhaiterais ici, pour y goûter, entre autres plai- sirs, celui des belles comédies qu'on y représente, et particu- lièrement d'un Cid qui a chai mé tout Paris. 11 est si beau qu'il a donné de l'amour aux dames les plus contmenles, donl fâ passion a même plusieurs fois éclaté au théâtre public. Ou

��1. Manuscrit Mabelot.

t. Feuilleton du Temps, 6 août 1883.

3. Fautes remarquées dans la tragi-comédie du Cid, p. 19.

4. Le Théâtre-Français «om Louis XIY.

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