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Page:Corneille Théâtre Hémon tome1.djvu/225

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INTRODUCTION 5i

a vu seoir en corps aux bancs de ses loges ceux qu*on ne voi' d'ordinaire que dans la Chambre dorée et sur le siège dei tlpurs de lys. La foule a été si grande à nos portes, et notrt lieu s'est trouvé si petit, gwe les recoins dulhcûlre qui servaient les ai très fois comme de niches aux pages, ont été des places cU faveur pour les cordons bleus, et la scène y a été d'ordinaire parée de croix de chevaliers de l'ordre '. »

Quoi qj'il en soit, on conçoit quelle force la règle de l'unité de lieu reçut de cette coutume qui persista si longtemps e1 contre laquelle Voltaire pieteslait encore. A quoi bon le décor conventionnel d'autrefois? Les bancs si bien garnis de la scène en eussent dérobé la vue aux spectateurs du parterre el des galeries. Ainsi l'on fut conduit à simplifier, à unifier de plus en plus la décoration, et, par suite, l'action, les grands mouvements dramatiques étant devenus aussi impossibles que les fréquents changements à vue. Sous ce rapport, la difi'é* rence entre le Cid et Horace est visible ; on sent que Scudéry et l'Académie ont fait leur œuvre. Beaucoup plus abstrait que le drame épique de Castro, le drame cornélien garde encore comme un souvenir lointain de l'épopée dont il est sorti. Récits épiques, élans lyriques, duel et jugement de Dieu, grands coups d'épée el duos amoureux longuement soupires, mélange intime de la galanterie à l'amour et du point d'hon- neur à l'héroïsme, tout cela, n'était-ce point encore l'épopée, ou le roman, ou; comme on disait alors, la tragi-comédie? Le Cid s'intitulait d'abord, en etfet, « tragi-comédie », et, si le mot a disparu, l'esprit est demeuré. Horace, au contraire, est une tragédie pure, un drame austère, presque nu, oix les idées sont aux prises plus encore que les sentiments. Aucun rayon de soleil ne l'illumine, et ce combat où triomphe le patriotisme absolu n'a même pas pour l'éclairer

Cette oDBcure clarté qui tombe de» étoiles ■.

En revanche, si Horace n'a plus le charme de la jeunesse, il a la force virile de la maturité. Surtout les unités de temps et de heu y sont scrupuleusement observées. Le combat el le jugement, si l'on admet que le jugement suive de quelques heures le combat, n'occupent même pas vingt-quatre heures; et SI Ion admet aussi, comme le veut Corneille, que poui rendre ce jugement le roi se transporte chez le vieil Horace,

1. Lettre du 18 jaovier 1637.

i. Ia Cid. acte IV, se. 3, v. 127J,

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